Je marchais dans les rues de Mystic Falls, à la recherche d'un petit coin pour me poser un moment. J'avais suivi les conseils d'une personne dont je ne préciserais pas le nom, ce n'est pas utile pour le bon déroulement de l'histoire. J'avais acheté... Bon d'accord, j'avais volé un espèce de carnet, un... Journal Intime. On m'avait dit de raconter ma vie, d'expliquer ce qui avait amené tous ces changements et raconter pourquoi j'étais passée de 1864 à 2013. Je m'asseyais sur les escaliers menant à la porte d'un vieil immeuble à moitié délabré, sortait un crayon et ouvrait le journal. Face à une grande et belle page blanche.

« Cher Journal,

Je crois que c'est comme ça qu'on commence un journal. Reste à voir si c'est vraiment utile. On m'a dit d'écrire, parce que, ça me ferait du bien, apparemment. Je ne vois pas très bien en quoi raconter ma vie sur une feuille de papier pourrait m'aider à faire le point sur ma vie.

Bon et bien... Je suis née en 1844, d'une famille plutôt modeste, avec une mère de famille qui aspirait à beaucoup mieux. Malheureusement elle ne devait se contenter que d'un simple homme qui n'était pas un noble du tout. J'ai grandit plutôt normalement, on attendait de moi que je sois la gentille petite-fille bien propre sur elle. Celle qui avait les meilleures manières qui soient, celle qui était polie, présentable. Ma mère voulait que je sois la jeune fille parfaite, alors que je préférais partir à l'aventure dans les bois et découvrir le monde à ma façon. J'avais une étroite relation fusionnelle avec mon père, il me comprenait, il aimait la vagabonde que j'étais et jouais même avec moi. Il m'apprenait à faire des pièges, à reconnaître les feuilles, les arbres. Il m'apprenait la vie à sa façon alors que ma mère passait son temps à lui hurler dessus parce qu'il me donnait le mauvais exemple.

Je grandissais, trop vite sans doute, mes sens s'éveillaient et j'appréciais d'autant plus partir à l'aventure. Je n'avais pas peur de me salir les mains, de gratter dans la terre et d'attraper les insectes main nues. Je pataugeais dans la boue et dans l'eau, et je rentrais en fin de journée, me faisant hurler dessus par la même occasion. Il arrivait que je me prenne des gifles, malheureusement, mon caractère devenait plus impulsif au fil du temps, je rendais les coups au premier abords, jusqu'à me prendre une véritable grosse claque dans la figure, là je ruminais ma rage intérieurement. J'aimais ma mère malgré tout, alors je faisais des efforts considérables pour pouvoir être comme elle le voulait. Je suivais ses cours de bienséance de manière assidue, j'essayais de bien me comporter dès que nous recevions des gens à la maison. Mais j'avais toujours ce petit air de malice lorsque j'échangeais des regards avec mon père, nous savions tous les deux que l'image ne faisait pas tout.

A l'adolescence, beaucoup de choses se dégradèrent, je devenais plus susceptible, impulsive, je m'énervais pour le peu de reproche ou de critique qu'on pouvait me faire. Je perdais petit à petit toutes les bonnes manières qu'on m'avait inculqué. Ma mère me le reprochait énormément, elle ne voulait pas que je sois toujours cette aventurière qui parcourait la forêt avec habileté. Mon père lui, essayait tant bien que mal de me canaliser, je ne savais pas ce qui m'arrivait à l'époque. Après maintes disputes entre mes parents, mon père me prit à part un soir pour faire une balade dans les bois, il voulait me parler. J'étais dans mon élément, et il avait l'air de me comprendre, je ne comprenais pas pourquoi on voulait toujours m'empêcher d'être celle que j'étais. Je ne comprenais pas non plus pourquoi ma mère avait peur de moi. Je n'allais pas lui faire de mal, certes, je pétais des plombs quand elle me cherchait trop, mais je ne lui levais pas la main dessus.

Mon père se décidait à parler. Après tout son discours, cet air si sérieux qu'il avait... Je ne pu m'empêcher d'éclater de rire. C'était n'importe quoi. Des loups-garous ? Je n'arrivais pas à y croire, et pourtant il avait l'air tellement sérieux. J'arrêtais de rire. Je lui demandais pourquoi il me disait tout cela, ça n'avait aucun sens. Il ne lâchait pas l'affaire, me disant que... Lui-même en était un. Il était vraiment en train de me dire qu'il était un loup-garou ? Ça n'avait aucun sens et j'en riais davantage. Il prit le chemin inverse, me disant que nous rentrions chez nous. Je le suivais en gardant le silence, il semblait vexé que je ne le crois pas. Il me faisait douter, mais cette histoire de loup-garou dépassait tout entendement. Il attendit patiemment la pleine lune pour m'emmener avec lui au sous-sol de la maison.

Je découvris qu'il ne me mentait pas. Je découvris qu'il était vraiment ce qu'il disait être, un loup-garou. J'étais choquée. Choquée comme jamais. Je voyais mon propre père se transformer sous mes yeux, je voyais ses os se briser et je l'entendais hurler. Ma mère savait tout cela, c'est pour ça qu'elle me craignait lorsque je pétais les plombs. Le gêne était transmissible et j'avais hérité de mon père... Ce qui expliquait mes sauts d'humeur, mon impulsivité, ma susceptibilité, ma violence, mon lunatisme.

Des mois plus tard, l'effet de la pleine lune était toujours plus violent sur mon caractère, ma mère et moi passions notre temps à nous disputer, et même si j'essayais d'éviter les conflits, elle continuait de chercher la confrontation au sujet de mes manières. Un soir, alors que la pleine lune n'était plus que dans quelque jours, ma mère insistait pour que je me tienne droite, que je souris, que je mange doucement, que je fasse des gestes gracieux... Une énième dispute se déclencha entre nous, et je pétais les plombs... Je pétais trop les plombs. Mon père n'était pas là, il était partit travailler, et moi je devais trouver le moyen de me calmer seule. Je ne trouvais pas de point d'ancrage pour calmer mon agressivité, et ma tête devenait douloureuse. Malgré le danger, ma mère continuait de me provoquer. Grossière erreur.

Je la frappais. Encore et encore, je ne pouvais plus m'en empêcher, les larmes coulaient sur mon visage mais impossible de les arrêter. Et après un dernier coup, je me calmais enfin, devant la figure en sang de ma mère. Je m'asseyais sur le sol et m'excusais en me balançant d'avant en arrière. J'attendais qu'elle me réponde, mais aucun son ne sortit de sa bouche. Plus aucun son ne sortit de sa bouche à partir de ce jour-là. Je restais assise là, voyant la journée défiler. Mon père rentra tard, et il me trouva sur le sol auprès du corps de ma mère. Il comprit, il ne dit rien, il emmena juste le corps, me laissant une nuit complète sur le tapis. La pleine lune suivante, je subissais ma première transformation, et je hurlais à la mort.

Les mois passèrent, je contrôlais un peu mieux ma transformation et mon état de loup-garou, mais ce n'était pas vraiment ça. J'avais du mal à garder l'emprise sur moi-même, c'était trop fragile. Je n'arrivais pas à contenir mon agressivité, je n'arrivais pas à rester attachée au sous-sol. En 1864, beaucoup de meurtres survinrent, mon père m'interdisait de sortir. Je ne comprenais pas pourquoi, je savais me défendre. C'est lorsque je vis l'un de ces corps que je compris pourquoi il préférait me garder à la maison. Ces meurtres étaient causé par des loups-garous. Voilà pourquoi je ne devais pas quitter la maison.

Malheureusement l'instinct de loup prit le dessus l'espace d'une nuit de pleine lune, et je quittais la demeure familiale sans vraiment avoir conscience de ce que je faisais. Je marchais dans la forêt, guidée par mes sens et mes envies de louve, quand je tombais nez-à-nez avec l'un des soldats. J'allais subir la transformation, je sentais mes crocs transpercer ma chaire et j'allais le faire devant lui. Mon rire cristallin brisa le silence, ce soldat me hurlait dessus, voulait savoir ce que j'étais, ce qui se passait. Il braquait son arme sur moi, et je continuais de hurler et de rire en même temps. Lorsque mes yeux prirent leur couleur... Il tira une balle, sans plus de cérémonie.

Je ne me souviens de rien de cette époque. Je me souviens du bruit du coup de feu, puis plus rien, le trou noir. J'étais dans le purgatoire surnaturel tout le reste du temps, à errer sans but et sans savoir ce qui se passait. Frigorifiée, et effrayée. Tout était sombre et j'avais l'impression de vivre éternellement. Ou ne pas vivre. Cette sensation restait quand même indescriptible.

Jusqu'au jour où tout partit en vrille. Je n'avais jamais su expliquer ce qui s'était passé, mais j'avais pu sortir de là, en passant par une jeune femme, une sorcière. J'ai découvert plus tard qu'il s'agissait de Bonnie Bennett. J'avais suivit le mouvement, et... J'étais revenue à la vie, sans savoir pourquoi. J'avais su plus tard les raisons mais... Je m'en fichais. J'apprenais que nous étions en 2013, que 150 ans étaient passés. Mon père, seule famille qu'il me restait était mort, ma mère était morte de ma faute, et je me retrouvais seule dans un monde moderne dont je ne connaissais rien, et en plus j'étais incapable de contrôler mes transformations. Je me demandais comment allait être la première pleine lune. Mais... Je m'inquiétais plutôt de ma survie. »

Je fermais le carnet et levais les yeux vers le ciel bleu et les passants. Une nouvelle vie m'attendait.